Poèmes écrit par le frère de Jacques Huberdeau : Saisons sur une boite à lettres.
J’ai vu fleurir l’aubépine et la violette,
S’épanouir le bouton d’or et l’aubriète.
J’ai entendu l’appel rauque des oies sauvages,
Les trilles des merles noirs au brillant ramage.
J’ai vu éclater les bourgeons gorgés de sève,
Faner l’ellébore, fleur d’un froid qui s’achève.
Dans l’air se répandait un parfum de printemps,
Une force soudaine effaçant le carcan
D’un hiver aux couleurs tristes et monotones
Qui rend la terre nue et les oiseaux atones.
Arrivaient les beaux jours en cortèges fleuris,
Semant dans les jardins, villages et prairies,
Des gerbes de couleurs et des idées aussi,
Sur une palette de la rue Marcoussis.
Le maître de ces lieux, grand peintre des saisons,
D’un pinceau printanier posa de belle façon,
Deux jolies marguerites, espiègles et rieuses,
Le regard pétillant, la corolle lumineuse.
Sur la porte de son coffret à courrier
Tel un paysage sur un calendrier.
Elles remplacèrent la feuille surannée
Du tableau hivernal du début de l’année,
Comme s’ôte et se jette la page dernière
D’un agenda portant nos taches journalières.
Passant, regarde bien ce décor éphémère,
Comme ce beau printemps, il ne durera guère.
Car surgira l’été, avec une autre image,
Un soleil flamboyant sur l’ocre d’une plage,
Une plaine endormie vibrante de chaleur,
Ou une nue d’orage aux sinistres couleurs.
Puis ce sera l’automne, et un nouveau tableau
Qui s’écrira au gré d’un habile pinceau.
Toi, facteur de la rue, oseras-tu alors,
Glisser un mauvais pli sous de si beaux décors ?
GH Mai 2017
Adieu les marguerites des beaux jours qui s’achèvent. D’un pinceau meurtrier trempé dans votre sève, L’artiste a effacé vos riantes frimousses Car vient un bel été qui harcelle et repousse Le printemps moribond hors du calendrier Et chasse l’image de la boite à courrier. Dans une débauche d’écarlates couleurs, Le pinceau meurtrier à nouveau créateur, Glorifie le retour des heures flamboyantes, Des soleils lumineux, des chaleurs écrasantes. C’est le temps des cocktails, feux de bois et grillades Terrasses, parasols, glaçons et tapenades Des zestes de citrons sur des coupes givrées Des plaisirs simples sous des horizons cuivrés. Promeneur, si la soif assèche ton gosier, Si une eau plus froide que le sang d’un glacier Te semble plus précieuse et plus désirable Que toute autre richesse ou bien inestimable, Jette un regard sur cette belle image. Regarde-la encore, mais ce n’est qu’un mirage. Poursuis ta longue marche ou frappe à cette porte, Tu auras bon accueil et boissons de toutes sortes.
G H juin 2017
L’Automne
Dans l’éternel concert des saisons Arrivent l’automne et ses couleurs. Le soleil aux brûlants horizons S’assagit et calme ses ardeurs.
Vient septembre et ses premières brumes. Fenaisons et cueillettes s’achèvent. La vie s’assoupit, l’âtre s’enfume, Sous terre s’en retourne la sève.
Le grenier garni par les récoltes, L’homme des champs reste en sa chaumière. Dans les sous-bois surgit la révolte Des grands oubliés de la lumière.
Dans l’humus germe l’heureux augure D’une intense richesse éphémère Née de la sublime pourriture D’une paillasse aux soieries légères.
Les longs fils ténus des moisissures Tissent une trame de dentelles Et pointe des frondaisons obscures L’humble et flamboyante chanterelle.
Le gros bolet au pied bedonnant, Se rit de la frêle coulemelle Et un anthurus extravagant Défie une amanite mortelle.
Petites pépites culinaires Ou beautés fourbes et sataniques, Coprins, russules et cortinaires Des sous-bois pointillent la tunique.
A Limours, sur une boîte à lettres, Je n’ose y croire, mais il se narre Que sont nés, petits lutins champêtres, Des champignons aux allures bizarres.
Trop lointains, je ne pourrai les voir Dans leur écrin sans mousse ni fougères, Mais ils ne sauraient me décevoir, Sur le maître, de doute, je n’ai guère.
Point d’humus mais un brillant pinceau. Pas l’espoir d’un festin délicieux, Ce n’est qu’un admirable tableau Un régal pour le plaisir des yeux. G H aout 2017